Publié le 21 août 2013

Les manifestants de la Journée de la Lutte contre l’Homosexualité ont exigé un traitement encore plus sévère contre les personnes LGBT.
Aujourd’hui, lors de la manifestation contre l’homosexualité à Yaoundé au Cameroun, le chef anti-gay Sismondi Barlev Bidjocka a déclaré qu’une milice privée patrouillait dans les rues de la capitale du Cameroun chaque vendredi et samedi en traquant les homosexuels.
Selon lui, ce vendredi 16 août, quatre hommes homosexuels auraient été arrêtés par cette brigade, et seraient toujours en détention au secrétariat d’Etat à la défense.
Ses déclarations viennent contredire les allégations que Issa Tchiroma Bakary, Ministre de la Communication du Cameroun,
à la suite de l’assassinat d’Eric Ohena Lembembe, un journaliste et militant des droits des LGBT. Le 19 juillet, Tchiroma a déclaré :
Il n’y a aucun complot d’Etat, ni même aucun complot social au Cameroun, qui serait dirigé contre les homosexuels. …
De nombreux homosexuels notoirement connus, vivent et circulent en toute liberté au Cameroun, sans que ne soient organisées des battues ou des expéditions punitives contre eux.
Mais Bidjocka précise qu’une brigade s’active à Yaoundé pour «traquer» les homosexuels. Le Secrétaire d’Etat à la défense lui aurait donné mandat de traquer tous les homosexuels au Cameroun, de ne pas les torturer, mais de les traduire en justice.
Selon la loi camerounaise, l’homosexualité est passible de cinq ans de prison, mais la loi est souvent appliquée largement au-delà du texte de loi, en soumettant les individus concernés à l’arrestation et l’emprisonnement s’ils semblent appartenir à une minorité sexuelle et cela sans aucune preuve de relation sexuelle. Actuellement, au moins trois personnes sont en prison au Cameroun en vertu de la loi anti-homosexualité et neuf sont en liberté sous caution en attendant leur procès. Ces chiffres ne prennent pas en compte les quatre personnes prétendument arrêtées le 16 août selon Bidjocka.
Selon Human Rights Watch, au cours des trois dernières années, au moins 28 personnes ont été arrêtées en vertu de la loi anti-homosexualité.
Les personnes LGBT au Cameroun peuvent également être confrontées à des coups et des lynchages. Depuis leur sortie de prison en janvier, deux personnes transgenres ont été attaquées à plusieurs reprises à Yaoundé depuis leur sortie de prison en janvier. Elles ont encore été attaqués par une foule le 15 août. Le 24 juillet, un homme a été lapidé à mort par une foule au sud-ouest du Cameroun après qu’il a été trouvé avec un amant.
Aujourd’hui, les manifestants de Yaoundé ont exigé un traitement encore plus sévère contre les personnes LGBT. Bidjocka et leRassemblement de la Jeunesse Camerounaise (RJC) ont demandé que la peine maximale de prison pour activité homosexuelle soit portée à 20 ans.
Les manifestations organisées par Bidjocka et le RJC avaient été présentées comme une deuxième édition de « la Journée internationale contre l’homosexualité », mais ce mouvement s’est trouvé réduit à une « Journée contre l’homosexualité », car il n’y avait aucune preuve que cette journée ait été observée ailleurs qu’au Cameroun, que ce soit aujourd’hui ou il y a un an.

La manifestation, qui a pris son départ dans le quartier Essos, n’a attiré que 16 manifestants anti-homosexuels, dont sept étaient âgés de moins de 15 ans
Selon un décompte de l’Associated Press, quatre groupes d’environ 40 personnes chacun ont pris part à la manifestation d’aujourd’hui. Toutefois, la manifestation qui a pris son départ dans le quartier Essos n’a attiré que 16 manifestants anti-homosexuels, dont sept avaient moins de 15 ans. De l’alcool a été donné à ces enfants à la fin de la manifestation.
Les pancartes et les brochures des manifestants portaient plusieurs messages:
-
Non à l’homosexualité
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On doit abattre les pédés, car ils ne méritent pas la vie
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Les pénis des pédés doivent être sectionnés et les sexes des lesbiennes, « bouchés »
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L’homosexualité est un crime contre l’humanité, une violation grave des Droits de l’Homme
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La jeunesse se mobilise pour combattre cette criminalité comportementale au Cameroun
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Hémorroides, incontinences déchirures du sphincter, SIDA…tels sont entre autres conséquences de l’homosexualité
- Chers parents protégez vos enfants contre cette chose immonde, chose QUI VIENT D’AILLEURS.
Les manifestants attiraient l’attention de la population au cours de la marche, en montrant des gestes d’égorgement pour signifier à ces personnes qu’il fallait ôter la vie de tous les homosexuels.
L’Associated Press a rapporté que des manifestants ont affiché des signes homophobes sur la devanture de bars soupçonnés d’être gay-friendly. Des affiches indiquant « Les homosexuels interdits » et « Pas d’homo au Cameroun » ont été placardées sur des bâtiments scolaires.
En marge de la manifestation, des défenseurs des droits de l’homme ont rappelé qu’un message interdisant l’accès aux personnes homosexuelles est affiché dans un bar depuis plusieurs mois. C’est d’ailleurs ce bar qui a servi de point de chute à la manifestation.
Les militants LGBT ont critiqué le gouvernement, car alors que les autorités interdisent toute réunion traitant de la lutte pour les droits des LGBT, tel que l’atelier démantelé en mars 2012, elles encouragent des manifestations incitant à la haine comme celle du RJC.
Le collectif des associations réunies de défense des Droits de l’Homme de Yaoundé a déclaré:
Les débordements, les actions et les autres manifestations hostiles de ces homophobes, se font avec la complicité tacite ou évidente des autorités camerounaises
Que ces dernières restent tolérantes vis-à-vis des auteurs d’actes de violences homophobes et restent complices des actions d’incitation à la haine comme celle de ce jour .
En conséquence, il est impératif d’interpeller avec force et argument ces autorités sur la nécessité d’interdire ce genre d’actions.
Me. Michel Togué, un des rares avocats au Cameroun qui accepte les clients LGBT, a déclaré qu’un certain nombre de militants des droits des homosexuels ont reçu des SMS de menace dans les semaines qui ont suivi l’assassinat de Lembembe.
« J’ai l’impression que la persécution des homosexuels est nettement en hausse depuis que Lembembe a été assassiné. Une manifestation comme celle d’aujourd’hui en est une preuve évidente », a déclaré Me. Togue. « Si je vous dis que je n’ai pas peur, alors je plaisante. J’ai peur pour ma sécurité ».
Il a déménagé sa famille hors du Cameroun l’année dernière après avoir été la cible de menaces de mort.
Ce poste comprend des informations provenant des observateurs de la scène et de l’Associated Press.
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